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Ecrits
Les Rues De Ma Jeunesse
Toulon, mes années cinquante
Les copains de mon père...

Combien de fois ai-je pu dire : "bonjour Monsieur". Mon père connaissait beaucoup de monde, de nombreux immigrés.
"Céri", nous le rencontrions parfois le dimanche sur la place de la Liberté. Un frisé avec des yeux bleus. Je ne me rappelle plus de sa femme, mais je sais qu’il avait deux enfants, une fille et un garçon. Là, encore, nous avons des photos qui garnissent la boîte en carton!


Et "Michéloni" !
J’ai l’impression qu’il voulait exhiber quelque peu sa réussite ! Il affichait une lignée de dents en or sur le devant de sa bouche ! On se serait cru chez le joaillier !
Il parlait "en travers" avec un accent qu’il était inutile de cacher tellement il s’entendait. Il avait toujours les cheveux lisses, peignés en arrière avec une couche de brillantine qui ne passait pas inaperçue. Lui aussi, nous le rencontrions le dimanche.

Parfois "chez Lupi" rue "du canon" (rue Pierre Semard) ou alors au bar de l’Opéra qui, comme son nom l’indique, était situé sur la grande place du théâtre.
Lupi (prononcez loupi) tenait un bar quelque peu exigu, et c’était, encore, un immigré jovial à la chevelure grise et un embonpoint marqué.
Et rituellement mon père me demandait : "Tu veux un sirop rouge ou un sirop vert ?"
Je n’aimais pas trop la menthe et préférais souvent la grenadine. C’était sur le chemin de retour de la gare SNCF. La sempiternelle promenade que j’accomplissais le dimanche avec lui lorsque le temps le permettait pendant que ma mère préparait le repas.


Le Bar de "Lupi" au coin du "canon" et de la rue Charles Poncy a dû changer bien des fois d'enseigne !

Depuis qu’il m’avait fait cadeau d’un train électrique " à l’occasion d’un Noël je voulais être " chef de gare ". Il fallait donc que j’étudie le comportement des trains, leurs passages, leurs manœuvres. Alors, sans que mon père me le demandât, nous prenions la direction de la gare.
Elle a été remodelée depuis. Le modernisme a fait tomber le "grand toit" de ferraille et de verre qui protégeait les quais. C'était une toiture un peu comme celle de la gare de Milan. Vous devez la connaître, qui n’est pas passé une fois par Milan dans sa vie ?
Une grande passerelle enjambait les voies. Là, je restais le plus de temps possible, tant que mon père pouvait supporter. Lorsque sa patience commençait à s’effriter, nous revenions sur nos pas et invariablement une halte se produisait chez Lupi.
"Dis bonjour au monsieur". C’est la phrase qui sortait de sa bouche quand il rencontrait un de ses amis, pour m’apprendre la politesse.
Je dois posséder une photo avec mon père sur ce pont. Toujours archivée dans la boîte en carton...

Au bar de l’Opéra, une ribambelle de copains de mon père était souvent assise sur l’esplanade, comme s’ils nous attendaient.
Encore sirop rouge ou sirop vert, au choix. Pastis pour les adultes.

"Ballotti", le patron connaissait bien mon père. Pour lui, il avait construit une maison du côté du Mai, près de La Seyne sur Mer. Son fils était expert comptable, j’ai effectué un stage d’une semaine chez lui lorsque j’avais une quinzaine d’années. J'habitais alors Bormes les Mimosas.
Des discussions qui n’en finissaient plus et qui me faisaient perdre patience s’engageaient alors. Je me languissais de partir, retourner chez moi où le repas dominical nous attendait. Ma mère était résignée dans l’attente. Parfois une engueulade nous accueillait... La patience a ses limites.



A gauche le bar de l'Opéra en 1962 au milieu en 2013. A droite une vue générale de la place du Théâtre avec le bar au fond...

Il y avait aussi "Buiatti", le tailleur.

Il habitait un appartement exigu de la rue Augustin Daumas, près de la rue d'Alger. Parfois le dimanche ou le soir après le travail ou l'école, nous allions le retrouver pour qu'il nous raccommode quelques pantalons ou vestes. Se faire confectionner un tailleur sur mesure à cette époque était un luxe que nous ne possédions pas.
Tout comme la télévision ! Un objet que personne de mes connaissances ne détenait.

Pour nos sorties, nous allions à l'Opéra trois ou quatre fois l’an.
Mon père troquait alors son sempiternel "marcel" estival pour arborer une tenue de circonstance. Il faisait un effort pour s'habiller un ton au dessus.
Nous allions systématiquement au "poulailler". D'une part parce que les places étaient moins chères, d'autre part car il est de notoriété publique que les mélomanes qui veulent apprécier la musique vont à cet endroit.

L’inconvénient majeur nous y étions mal installés. Des rangées de banc étroits, peu larges, faisaient office de sièges. A la fin de la séance, le derrière nous cuisait, mais la joie d’écouter ces chefs d’œuvres nous faisaient oublier nos souffrances.
J’ai certainement vu pour ne pas dire entendu tous les plus grands opéras des compositeurs les plus connus. La Traviata, Lohengrin, Carmen, les Noces de Figaro, Le barbier de Séville, Il Trovatore, traduisez le Trouvère, La Tosca, Mme Buterfly, Lucie de Lammermoor, Nabucco, etc., etc., etc.
Maintenant, quarante ans après, je reconnais certaines musiques. Je le dois à mon père, je ne l’oublierai pas.

 

Une vue de la scène de l'Opéra de Toulon depuis le poulailler...

Charly. Vous devriez le connaître maintenant si vous avez surfé sur le site !
Qu'en pense t'il de l'opéra et du poulailler ?
Cliquez sur les images ci après et vous aurez une "genèse" de ses caricatures et anecdotes...



Charly et l'opéra

La direction

Les coulisses

Le Conservateur

Les anecdotes 1


Les anecdotes 2


Les anecdotes 3
N'oubliz pas de lire l'encadré ci contre relatif au poulailler!


Parfois les après midi en certaines saisons, nous allions aux champignons. Mais la campagne était loin. Il fallait que l’on nous y amène mon père n’a jamais eu le permis de conduire. C’était "Micheli" surnommé "Brescia" (il était originaire de cette ville d'Italie), qui "officiait" avec sa Dauphine jaune. Il boitait quelque peu, je n’en ai jamais su la raison.
Avec sa femme, plutôt "forte", ils avaient un fils. Plus tard, il travaillera à l’arsenal. Je ne les ai plus jamais revus après mon déménagement...

Il y avait également "Rédento Zanini".

Mon père l’a connu avant la guerre, c’est dire qu’ils étaient amis de longue date ! Lui avait une 203 Peugeot noire. La particularité de cette voiture ce sont les clignotants. C’étaient des flèches en plastique qui "sortaient" de la carrosserie lorsqu’on les actionnait. Cela faisait un bruit et je demandais souvent d’où il provenait. Invariablement l’on me répondait : "c’est pour le danger"....
Parfois, le dimanche, nous allions leur rendre visite. Ils habitaient près du cimetière central et j'ai encore devant mes yeux la figure rigolarde de Mme Zanini avec son sourire et sa voix franche et grave.

 

La fameuse 203 Peugeot

Et "Marchesi" ?

Un Corse sans doute… à moins qu'il ne fût Italien ? Etait-ce un concierge ? Exactement, je ne saurais dire. Il habitait une loge face à "l'ex entrée" du musée des "Amis du Vieux Toulon".
J'étais nettement plus jeune et je n'ai que peu de flashs en mémoire. Je me rappelle les quelques marches que nous gravissions pour aller dans sa loge après avoir passé une grande porte digne de ce nom qui donnait sur le Cours Lafayette au 69 exactement (voir photo icone Sommaire). Il y avait aussi, les discussions que ma mère et mon père avaient à son sujet, discussions relatant le décès d'une petite fille, dont je n'ai pas souvenance, et qui serait morte d'avoir mangé un œuf qui n'aurait pas été frais…

La porte d'entrée de la loge de Marchesi face à "l'ex" entrée du musée des "Amis du Vieux Toulon".

Notez que le "musée du vieux Toulon" a déménagé sur Saint Andrieu(x) en 2015 (je pense)... "ma rue"...